7 personnes ont été lâchement assassinées à Toulouse et Montauban, plusieurs autres sont blessées. Le drame est là, incontestable. 15 jours de folie ont tenu en haleine toute la France. Pendant ce temps plusieurs dizaines de personnes sont mortes, de morts non naturelles, dans notre pays… Alors pourquoi se focaliser sur Mohamed Merah? Le meurtre d’ enfants avant tout, c’est une évidence, on touche là à un des tabous les plus forts de la majorité des sociétés. Mais surtout l’angoisse (sans commune mesure avec le risque réel… statistiquement parlant tout du moins) lié à tous les actes de terrorisme.
A Toulouse nous avons vécu un petit Oslo -enfin Ander Behring Breivik a tué 77 personnes ce qui est sans commune mesure-, mais la portée symbolique est similaire. Politiquement et psychologiquement aussi nous avons connu le même processus : nos fantasmes ont parlé en premier, la réalité est venue les démentir…
A Oslo tout le monde est immédiatement parti sur le terrorisme islamique avant de se rendre compte que l’assassin, isolé, était plutôt issu de l’ultra droite chrétienne version délirante. A Toulouse, nombre de commentateurs de la première heure sont donc cette fois partis sur… l’ultra droite. Encore faux ! Et nos politiques et moralistes auto-proclamés de rebondir, comme le trop empressé François Bayrou, sur le thème de l’ambiance délétère et les discours de haine envers l’autre de « certains » (Sarkozy ? Le Pen ? Guéant ? ) qui auraient poussé un déséquilibré d’extrême droite raciste à passer à l’action. Analyse un peu hative et confortable bien qu’électoralement bien vu.
Tout faux… Ou presque. Nous avons bel et bien affaire à un acte de racisme, même s’il n’est pas ordinaire. Racisme anti-Français, fussent-ils musulmans d’ailleurs, comme les parachutistes assassinés et racisme anti-juifs, les victimes suivantes programmées (policiers, militaires) étaient dans la même veine. Oui un jeune d’origine maghrébine peut être raciste, grande découverte ! C’est normal, c’est un être humain comme un autre et les thèses de haine fonctionnent dans toutes les cultures. Au moins cette fois personne ne nous a fait le coup du « c’est un antisémite, c’est pire encore qu’un raciste »… La haine de l’autre est la haine de l’autre, il n’y a pas de haine « supérieure »… même si les Juifs ont bien pris tout de même et sont les victimes expiatoires par nature pour beaucoup et ce depuis longtemps.
Ce qui inquiète un peu plus, sans surprendre les spécialistes de l’islamisme radical, c’est que Mohamed Merah volait un peu, courrait parfois les filles, sortait et consommait des produits loin d’être halal voire pire, qu’il était gentil voire serviable (un grand classique : à voir dans une autre de mes chroniques). Les convertis et les pêcheurs ont toujours été les brebis favorites des religieux les plus extrémistes et moralistes. Il n’est qu’à voir un branleur alcoolique psychopathe comme George Bush junior en porte-drapeau des fondamentalistes chrétiens les plus demeurés partir pacifier le Moyen-Orient en vertu d’un plan clairement annoncé et totalement surréaliste pour comprendre en quoi les petites frappes comme Mohamed Merah ou les flambeurs névrotiques comme George Bush sont nos pires ennemis.
Reste que l’on se sent plus proche d’eux que d’ascètes déconnectés de la vie et pourtant plus violents en discours. Car la tentation contradictoire entre la morale et la dérive immorale, voire criminelle, nous l’avons tous en nous, nous pouvons la comprendre. Alors pour oublier de réfléchir et de s’interroger, on se rassure « c’est un fou » pose-t-on rapidement. Ander Behring Breivik a d’ailleurs réussi à obtenir ce statut. Mais l’est-il vraiment ? Mohamed Merah, on ne le saura jamais, quoique nombre d’indices laissent juste penser que sa bêtise crasse et la dérive ordinaire d’un délinquant multirécidiviste ont, dans son cas, donné une alchimie plus dangereuse que d’habitude. Même si pour Mohamed Merah on parle de « petite » délinquance.
Petit délinquant bien sûr… car le « vol avec violence » ce n’est pas un braquage… Quoique, pour dire une ânerie pareille, il faut juste n’avoir jamais subit un « vol avec violence ». Là encore les mots nous enferment, l’expérience est différente. Un braqueur calme pointe une arme dans votre direction et c’est un « grand » délinquant. Un type vous roue de coups parfois avec une arme, vous réduit la tête en bouillie pour le fun, votre porte-feuille ou un portable et ce n’est qu’un « petit » délinquant. On meurt plus de l’action de petits délinquants que de celle de braqueurs, enfin sauf lorsqu’ils tirent au RPG7 ou à la kalachnikov sur un fourgon, comme ceux de la nouvelle vague !
En clair Mohamed Merah n’a pas fini de nous pourrir la vie. Un médiocre violent a réussi à confisquer la compagne électorale. L’un des seuls qui ait compris la stupidité de se laisser prendre en otage a été François Bayrou, qui a continué ses meetings. Manque de chance, il a tout gâché en sortant des âneries grosses comme ses préjugés. Les mots sont importants mais les mots sont des prisons pour nos esprits ou des béquilles confortables nous donnant des grilles de lectures pré-écrites, donc fausses.